C'était quelque part dans une ville du Japon, mais je ne sais plus laquelle. Je me suis enfuie plusieurs années plus tard. C'était un treize. Non, pas un vendredi treize. Simplement un treize novembre, un jour d'automne, presque d'hiver. Un jour tout à fait banal. Ma mère, je suppose que mon père aussi, mais j'en ai aucune idée, étaient des esclaves. Ils étaient les esclaves d'une famille riche au cœur du Japon. Cette famille avaient plusieurs esclaves, d'ailleurs. En pensant, mon « père » pourrait être bien être cette saleté de maître, finalement. Mais je préfère me dire qu'il était un esclave. C'était le soir, très tard. À ce qu'on m'a dit, il était près de 23h. J'étais jeune quand on me raconta cette histoire, je devais avoir six ou sept ans. Ça se peut donc que ça ne soit pas très fidèle à la réalité... Mes souvenirs sont flous. Le soir où ma mère m'a raconté ma naissance, j'étais fatiguée et elle murmurait pour ne pas se faire entendre. Elle était entrain de finir de cirer le salon de ses maîtres. Pff, ce mot me dégoûte rien qu'à l'écrire.. Et pis soudainement, comme ça, elle avait eu ses contractions. Alors qu'elle ne savait même pas attendre un enfant, imaginez. Le maître n'a pas du sauter de joie, mais en même temps... Qui sait ? Ça fait un esclave de plus, et puisqu'il a la change de l'élevé depuis la naissance, il a dû penser qu'il pourrait modeler l'enfant selon ses volontés.

Mais cet enfant c'est moi, et jamais il n'a réussi. Depuis toute petite, j'avais la conviction d'être un jour libre. J'ai rarement obéi, sinon, si j'obéissais, c'était simplement parce que j'avais la flemme de me disputer encore et encore. Je risquais de me faire mettre à la porte. Je préférais quand même partir de moi même que me faire foutre dehors! J'ai ma fierté, moi aussi. Je profitais qu'il ait le dos tourné et soit trop occupé à autre chose pour me surveiller pour mettre le bordel dans la pièce, faire des conneries et surtout, surtout, surtout : faire honte à son maître lorsqu'il avait des invités au manoir. Un neko, ce n'est pas censé se comporter comme elle le faisait. Alors en quelque sorte, c'était comme si il n'était pas arrivé à la dresser correctement. C'était une honte, pour quelqu'un qui était réputé comme lui dans la ville où ils étaient. Un jour, j'avais 15 ans, ma mère vint me voir. Elle me dit : « Myunn. C'est le jour. C'est aujourd'hui que tu dois fuir. Cours, cours vers la liberté, Myunn. Oublie mon nom, et devient une neko digne, surtout pas une esclave comme je suis.. Je suis fière de toi, de ton courage. Fuis, c'est le temps. Maintenant. » Je n'avais effectivement jamais eu froid aux yeux, avec mon maître.  Je n'avais pas peur de ce qu'il pouvait faire, de ses menaces.

J'ai souvent récolté des coups suite à mes conneries et de ce fait, j'ai plusieurs cicatrices sur les bras et sur les jambes. Par contre, il n'a jamais abusé de moi sexuellement. Je crois que ma naissance l'a dégoûté, surtout quand il s'est aperçu que finalement, je n'étais pas tellement « dressable ». Depuis ce temps, je crois, il n'a jamais touché de cette manière à une de ses esclaves. Sur le coup, je n'ai pas tout compris ce que ma mère m'avait dit à ce moment. Sur le coup, tout ce que j'ai retenu, c'est sa demande d'oublier son nom. C'est ce que j'ai fais. À ce moment-là, mon nom, il est devenu simplement Myunn. À moi de m'en trouver une autre au cours de ma conquête de la liberté. Parce que la liberté, je l'aurais un jour. Je lui ai promis. Je lui ai promis, juste avant de faire demi-tour et puis de partir en courant en claquant la porte derrière moi. Pendant des heures, j'ai couru, encore, encore et encore. Sans m'arrêter, jusqu'à tomber d'épuisement, de faim et de soif à l'ombre d'un arbre. J'étais sorti de la ville, me faufilant à travers des ruelles, cachant mes oreilles et ma queue au mieux pour ne pas me faire repérer. Je voulais surtout pas finir ailleurs, dans une autre maison, à devoir obéir...

Pendant deux ans, je me suis promenée d'endroit en endroit. Je n'ai pas trop le sens de l'orientation, alors je suivais mon instinct. Ne me demandez pas de retourner à l'endroit où je suis née, jamais je n'en serais capable. La liberté, je ne l'ai pas encore trouvé. Je pense que ça sera long, avant que je l'ai pour toujours. Ça sera long, mais ça va en falloir la peine. Pendant ces vingt-quatre mois de fuite, j'ai appris à chasser et me nourrir par moi-même. Parfois, quand je restais à un endroit plusieurs semaines, je me faisais un nid, dans les creux des branches d'un arbre. J'imitais les écureuils. D'ailleurs, ça goûte bon les écureuils. C'est devenu ma nourriture préférée depuis que j'ai dû m'alimenter par moi-même. J'ose pas trop m'aventurer dans les villes, même pour me nourrir. J'ai trop peur de me faire repérer et les humains, j'les déteste. J'y vais quand je suis obligée, pour la traverser, ou quand je trouve vraiment pas de nourriture au bout de quelques jours. Donc maintenant, j'me retrouve où je suis en ce moment : Dans mon nid, au creux des branches, à observer la ville à côté de moi, la ville où je me suis arrêtée quatre jours plus tôt.